Joël Dicker, le gentleman du polar

«J’ai toujours pensé que lire, c’est sexy, moderne et une source de richesse illimitée.» Marié et père de deux jeunes enfants, l’écrivain- entrepreneur de 37 ans mène une vie très discrète à Genève, sa ville natale.
«J’ai toujours pensé que lire, c’est sexy, moderne et une source de richesse illimitée.» Marié et père de deux jeunes enfants, l’écrivain- entrepreneur de 37 ans mène une vie très discrète à Genève, sa ville natale. - ®ANOUSH ABRAR

À peine paru au printemps, votre nouveau roman « L’affaire Alaska Sander » dernier volet de votre trilogie Harry Québert, caracolait en tête des ventes. Une surprise ?

De manière générale, en littérature, la réussite ne répond à aucune règle précise. Ce qui fait que le doute, je l’ai toujours. Mais je ne vous cacherai pas que le succès de L’affaire Alaska Sanders me rend particulièrement heureux parce qu’il arrive après une longue période de confinement, qui m’a éloigné physiquement de mes lecteurs. Aller à leur rencontre, comme je le fais depuis plusieurs mois déjà, en France, en Belgique, en Suisse, en Italie et en Espagne, quel plaisir pour moi !

Justement, quel genre de relations entretenez-vous avec vos nombreux lecteurs, dont certains sont des fans inconditionnels ?

Ils me manifestent beaucoup de gentillesse et d’attention, cela me touche énormément. On me dit souvent : « Vous n’en avez pas marre de ces séances de dédicaces ? ». Non, au contraire, ce sont des moments précieux. Vous ne pouvez imaginer à quel point toutes ces rencontres m’apportent une énergie extraordinaire. Elles donnent tellement de sens à ce que je fais ! Beaucoup de gens viennent me dire qu’ils ne lisaient pas avant, et qu’ils s’y sont mis. Si j’ai pu leur apporter un moment de plaisir, pour moi, c’est énorme ! J’ai toujours pensé que lire, c’est sexy, moderne et une source de richesse illimitée.

Comment et pourquoi écrivez-vous ?

Je commence à travailler très tôt le matin, vers 4 heures. Un peu à la main, un peu à l’ordinateur. J’ai un bureau à Genève où je peux m’isoler dans ma petite bulle. Lorsque j’écris, j’écoute beaucoup de musique, de l’opéra, du classique, du rock, de la pop, tout dépend de mon humeur du moment. Quant aux raisons pour lesquelles j’écris, c’est difficile à dire. Mais je pense que j’ai eu le déclic le jour où je me suis mis à écrire des livres que moi-même, j’aurais eu envie de lire…

Vous êtes passé maître dans l’art du suspense, du rebondissement. Quelle est votre principale recette ?

Surtout, ne pas suivre de plan, ce serait un enfermement ! Ce qui me plaît, c’est le moment où je m’engage dans une direction à laquelle je ne m’attendais pas du tout. Cette liberté de me laisser surprendre, je ne l’aurais jamais eue avec une trame et un coupable prédéfinis. Dès les premières pages, je ne maîtrise rien. Mon seul moteur, c’est le plaisir de suivre mon instinct.

Votre écriture est très cinématographique. Envisagez-vous l’adaptation de vos romans sur grand écran ?

Cela me titille, c’est vrai. Je suis actuellement en discussion sur certains projets. Mais l’adaptation d’un livre reste très compliquée, surtout à partir du moment où vous êtes assis à une table face à des producteurs…

Quels souvenirs gardez-vous du tournage de votre best-seller La vérité sur l’affaire Harry Québert, une mini-série de 10 épisodes, diffusée en 2018 sur TF1 ?

Des souvenirs incroyables faits de rencontres humaines merveilleuses. D’abord avec Jean-Jacques Annaud, le réalisateur. Il m’a accueilli sur le tournage, qui avait lieu au Canada, avec beaucoup de bienveillance. Mais j’imagine aussi avec un peu d’appréhension, au début, de voir débarquer l’auteur ! Nous avons passé plusieurs mois ensemble et tissé une belle amitié. Patrick Dempsey, qui interprétait Harry Québert, était lui aussi très abordable. C’est un homme charmant, intelligent, passionné, qui aime partager, échanger…

Pourquoi venez-vous de lancer Rosie&Wolfe, votre propre maison d’édition ?

Bernard de Fallois, mon éditeur dont j’étais très proche, étant décédé en 2018, j’ai repris mon indépendance en créant ma propre structure avec une petite équipe dédiée. Elle ressortira tous mes titres, mais elle publiera aussi mes romans à venir et, dès 2023, d’autres livres – pas plus de deux par an – d’écrivains coups de cœur.

Vous êtes juriste et ancien assistant parlementaire. La politique, en cette période particulièrement difficile, vous manque-t-elle ?

La politique m’intéresse toujours beaucoup car elle est le reflet du monde dans lequel on vit. Je suis très content d’avoir eu cette expérience car elle m’a permis de mieux comprendre les mécanismes de la démocratie suisse. Mais je n’ai ni la vocation, ni l’ambition de devenir politicien !

Son dernier roman, «l’Affaire Alaska Sanders»

Un crime parfait, deux coupables finalement innocents…Cette intrigue donnera beaucoup de fil à retordre à l’écrivain Marcus Goldman et à l’inspecteur Perry Galahowood, héros récurrents de la triologie Harry Québert.