Bonneville : sillonner les rues la nuit en quête de secours à offrir

Outre la générosité et le beau geste de répondre à des besoins immédiats, les maraudes sont avant tout des tournées de rencontres.

Les sans-abri sont pour une grande part invisibles et très souvent ils ne sollicitent rien. La mission des maraudeurs, à Bonneville comme ailleurs, est de les repérer, de recréer du lien et de favoriser une orientation d’accueil, d’accompagnement ou de soin.

Une maraude, ça s’organise

Il est 17 heures. Comme chaque vendredi jusqu’à 21h, après un appel au 115 pour recueillir les signalements d’urgence, c’est l’heure du départ pour André Inthasane responsable maraude et son équipe. À bord du camion de l’association chargé de ravitaillement, direction la gare pour faire le point avec Léonard Zimmer de l’unité mobile d’intervention sociale (UMIS). Que s’est-il passé à l’accueil de jour des bartavelles, quelles sont les situations préoccupantes ? Autant d’informations importantes à transmettre avant le départ.

Une mission au cas par cas

« Nous ne savons jamais combien de personnes nous allons croiser sur notre chemin, nous dit l’équipe. Mais l’important est de se rendre visible, montrer que nous sommes là. Au fil de la tournée entre la gare de Bonneville, les parkings de lidl, carrefour et super U de Marignier, quelques personnes se présentent spontanément. Le temps d’un café partagé, et surtout des inquiétudes, on écoute, on évalue la situation et on aiguille au mieux au cas par cas. On prend aussi des nouvelles d’un SDF que l’on n’a pas vu depuis un moment ».

20h15, arrivée au centre de Cluses. « La nuit est tombée, il fait froid et il est peu probable de faire des rencontres, lance l’équipe. Ils sont déjà à l’abri et là, pas question de déranger. C’est rare que les gens soient violents envers nous, mais nous ne prenons aucun risque. Pas d’ingérence. »

«Les locaux nous soutiennent»

Les locaux mais aussi les commerçants sont des aides précieuses. « Ils nous soutiennent pour améliorer le quotidien des sans-abri nous confie l’équipe. Chaque vendredi, petite halte à la boulangerie de la gare qui nous donne le pain. La pizzeria de la gare, donne des bons pour que les personnes puissent manger un plat chaud, ce qui est loin d’être facile dans la rue. Au centre-ville, ONEM propose à sa fermeture, tous les produits frais invendus. Beaucoup de petits gestes qui comptent. »

Le 115 sature avec plus de 25 500 appels par année

Au vu d’un accroissement des personnes vivant dans la rue, les maraudes hivernales de l’unité locale de la croix rouge démarrées en 2017, et plus récemment estivales pourraient s’intensifier, à raison de deux maraudes par semaine.

Des chiffres qui interrogent

Bien qu’il soit très difficile de donner des chiffres, Léonard Zimmer estime en moyenne la population de la rue à 10 % de travailleurs, 40 % de jeunes isolés, de retraités et de familles, et 50 % sous addiction et troubles psychiques.

Réunion des bénévoles avec le SIAO74 et l'UMIS pour améliorer ses pratiques d'accompagnement.

Un observatoire social

L’UMIS composé d’un éducateur spécialisé, d’une assistante sociale et d’un infirmier, intègre en févier 2019 le SIAO74 d’Alby sur Cheran créé en avril 2017. Dirigée par Nathalie Denikine, cette plateforme financée par l’Etat, intègre trois pôles. Le Pôle Accueil, le pôle insertion et le pôle urgence du 115 qui recense, analyse et traite toutes les demandes de mise à l’abri pour les 900 places d’urgences que compte la Haute-Savoie. Les familles restent prioritaires.

Professionnaliser des bénévoles

Les maraudeurs sont le premier maillon de ce dispositif. Pour monter en compétence, les bénévoles sont accompagnés par des professionnels afin de mieux aller vers les personnes et être en capacité de les orienter. Un référentiel et un classeur de bonne conduite ont été élaborés et des réunions sont également organisées pour partager les expériences et analyser les pratiques d’accompagnement.